Arabie saoudite: le créateur d’une série Netflix condamné pour terrorisme

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Abdulaziz Almuzaini lors d'un festival de cinéma à Djeddah, en Arabie Saoudite, en novembre. (Photo Daniele Venturelli/Getty Images)

Le créateur saoudien d’une série d’animation Netflix, connue pour aborder des sujets tabous dans le royaume conservateur du Golfe, affirmé avoir été condamné par un tribunal antiterroriste en Arabie saoudite, suscitant les condamnations de défenseurs des droits humains.

La Cour pénale spécialisée, une juridiction établie en 2008 pour traiter les affaires liées au terrorisme, « m’a infligé (une peine) de 13 ans, suivie d’une interdiction de voyager pendant 13 ans », a déclaré Abdulaziz Almuzaini dans une vidéo publiée en ligne la semaine dernière, et supprimée depuis.

Dans une deuxième vidéo mise en ligne cette semaine, et toujours disponible sur X, il apparaît dans une voiture, disant qu’il avait été interdit de quitter le territoire saoudien.

Les autorités saoudiennes n’ont pas répondu dans l’immédiat aux sollicitations de l’AFP, et le créateur n’a pas pu être joint.

Diffusée depuis 2021, son émission satirique Masameer County, présentée comme « un regard humoristique sur une Arabie saoudite en mutation », aborde des sujets comme les conflits entre tribus ou les groupes jihadistes, et fait même allusion à l’homosexualité, dans un pays où elle est criminalisée et passible de la peine de mort.

Le Wall Street Journal a affirmé jeudi que des documents judiciaires liés à cette affaire mentionnaient d’anciens tweets de M. Almuzaini qui « ridiculisaient les régimes arabes (…) ou soutenaient les droits des femmes ».

Dans la vidéo supprimée, que l’AFP a pu consulter, M. Almuzaini a dit avoir été accusé de promouvoir l’homosexualité et le militantisme, et contraint de fermer sa société, Myrkott Animation Studio.

Il a également lancé un appel au prince héritier Mohammed ben Salmane, le dirigeant de facto du royaume et artisan de plusieurs réformes sociales ces dernières années, en espérant qu’il « corrigera une partie de ce qui (lui) est arrivé ».

L’Arabie saoudite est accusée par les défenseurs des droits humains de mener une répression féroce contre la moindre critique en ligne.

Ces deux dernières années, le système judiciaire a « condamné et infligé de longues peines de prison à des dizaines de personnes pour s’être exprimées sur les réseaux sociaux », ont affirmé en avril l’ONG Amnesty International et l’association de défense des droits humains ALQST.

Les autorités saoudiennes affirment que ces affaires sont liées au terrorisme.

Contrairement d’autres cas très médiatisés, le créateur saoudien ne semble pas avoir été incarcéré.

Les poursuites engagées contre lui témoignent toutefois d’une tendance inquiétante, estime Abdullah Alaoudh, du Middle East Democracy Center à Washington.

« Les industries créatives d’Arabie saoudite ne prospéreront pas, et n’attireront pas d’investissements, tant que les autorités ne reconnaîtront pas et ne respecteront pas pleinement les droits humains« , affirme-t-il.

Lina al-Hathloul, responsable de la communication à ALQST, basée à Londres, a dénoncé pour sa part l’interdiction de voyager imposée au créateur, tout comme à sa soeur Loujain al-Hathloul, célèbre militante des droits des femmes.

« Nous aimerions tous vivre dans le pays, mais en sécurité, sans ces violations et cette interdiction de voyager arbitraire et injustifiée, qui a épuisé de nombreuses personnes, y compris ma famille« , a écrit la responsable sur son compte X.

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