Législatives en Afrique du Sud : l’ANC, grand allié du Polisario, a perdu sa majorité absolue

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Le président sud-africain Cyril Ramaphosa ©Archives

Après trente ans de règne en Afrique du Sud, le Congrès national africain (ANC), au pouvoir depuis l’avènement de la démocratie et l’élection de Nelson Mandela en 1994, a perdu sa majorité absolue à l’Assemblée nationale.

Selon les résultats de la Commission électorale samedi, après dépouillement de 99,85% des votes, le parti du président Cyril Ramaphosa a recueilli 40,21% des voix lors du scrutin de mercredi et enregistre un revers cinglant, en plongeant nettement sous la barre critique des 50%. La plus grande formation d’opposition (Alliance démocratique, DA) rassemble 21,79% des suffrages exprimés. Le parti uMkhonto weSizwe (MK) de l’ex-président Jacob Zuma, né seulement quelques mois avant le scrutin, réalise une performance à 14,61%, tandis que les radicaux de gauche des Combattants pour la liberté économique (EFF) restent à 9,48%.

Les résultats définitifs du scrutin le plus disputé de l’histoire démocratique du pays doivent être annoncés dimanche mais sont déjà contestés par certains candidats, notamment M. Zuma.

« Personne ne doit déclarer (les résultats, ndlr) demain. Si cela arrive, vous allez nous provoquer », a prévenu l’ancien président de 82 ans. Son incarcération en juillet 2021 pour outrage avait provoqué des troubles, qui ont fait plus de 350 morts.

Jusqu’à présent, l’ANC tout-puissant avait remporté chaque élection nationale avec une large majorité. Mais la désillusion des 62 millions de Sud-Africains a cette fois vaincu une loyauté longtemps infaillible envers le mouvement qui a libéré le pays du joug de l’apartheid.

Dans la deuxième puissance industrielle du continent, le chômage frappe un tiers de ceux en âge de travailler et plus particulièrement les jeunes. La pauvreté s’aggrave et les inégalités se creusent, tandis que la criminalité bat régulièrement ses propres records.

Participation en baisse 

Au quotidien, les coupures répétées d’eau et d’électricité rappellent à quel point le rêve d’une nation dotée d’un accès pour tous à l’éducation, un logement et aux services de base, promise par l’ANC à la fin de l’Apartheid, est encore hors de portée.

Pire, la confiance s’est envolée à mesure qu’ont éclaté ces dernières années de multiples scandales de corruption impliquant des hauts dirigeants du parti et nourrissant les gros titres.

Appelés aux urnes mercredi, quelque 16 millions d’électeurs se sont déplacés, pour beaucoup avec une colère qui couvait depuis longtemps : l’ANC n’avait déjà rassemblé que 57% des suffrages exprimés aux dernières législatives de 2019, contre 70% en 2004.

La participation s’établit pour l’instant à 58,6% en baisse par rapport aux 66% lors du dernier scrutin.

Après l’annonce des résultats finaux, les 400 sièges de députés seront répartis. La nouvelle Assemblée devra ensuite siéger courant juin pour élire le prochain président.

Face aux contestations qui émergent, le président de la Commission électorale Mosotho Moepya a assuré que son instance allait examiner « tout ce qui se présentait à eux » et a ordonné le recompte de voix dans 24 cas. « La commission sera prête à annoncer les résultats de ces élections demain » dimanche, a-t-il assuré.

L’ANC, qui détient actuellement 230 sièges (57,5%), reste la plus grande formation politique. Mais dépouillé de sa stature de parti dominant, il devra entamer des négociations dans les prochains jours.

« Aucun compromis » 

A ce stade, les spéculations vont bon train sur la formation du prochain gouvernement, experts et observateurs misant sur la formation d’un gouvernement de coalition.

Si l’ANC décide de se rapprocher de la DA, il devra faire des concessions au mouvement libéral qui prône des privatisations et une dérégulation de l’économie.

Un rapprochement avec l’EFF et le provocateur Julius Malema impliquerait des compromis sur des demandes de réformes radicales telles que la redistribution sans compensation des terres aux Noirs et la nationalisation de secteurs économiques clefs.

« Nous ne sommes pas désespérés et ne ferons aucun compromis sur nos revendications et nos principes », a martelé M. Malema samedi.

Largement en tête avec 45,90% des voix dans la province du KwaZulu-Natal (KZN, est), fief traditionnel de l’ANC (17,64%), le MK devient la troisième force du pays. Mais le président Cyril Ramaphosa, 71 ans, et Jacob Zuma, 82 ans, sont de vieux ennemis politiques et un apaisement des relations entre les deux hommes semble improbable.

L’idée que l’ANC puisse continuer à gouverner malgré la perte de sa majorité absolue, sur la base d’un accord avec certains partis sur des aspects clefs comme le budget ou un engagement à ne jamais soutenir de motion de censure, fait également son chemin.

« Un gouvernement minoritaire serait quelque chose de totalement nouveau en Afrique du Sud mais c’est une option parmi d’autres », a confirmé à l’AFP Helen Zille, dans le comité de tête de la DA.

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